À la suite d’un premier tome paru en 2019 et édité par La Vie du Rail, La transition après la vapeur, Benoît Hardy, ancien conducteur, propose une suite à cette longue marche du dépôt du Mans. Il s’ouvre avec l’électrification de la ligne Le Mans – Nantes en 1983. À ce moment-là, Le Mans reste encore un dépôt relais de première importance…, mais engagé jusqu’en 1989 dans des « modernisations » qui sont autant « de signes de déclin » : telle l’arrivée d’Etna et du NAW accompagnant le déclin du service marchandises. Tel est le sujet de la première partie. « À la recherche d’un nouvel élan, de 1989 à 2005 » caractérise une seconde période. Alors que disparaissent les turbotrains RTG Caen – Tours en 1994, Le Mans profitera des trains de travaux durant le chantier de la LGV ; mais ses tractionnaires seront un temps exclus de la conduite des TGV Atlantique, profitant plutôt de la relance des TER et du nouveau souffle des dessertes de la grande couronne parisienne. La dernière étape (« Un établissement et des métiers transformés ») s’ouvre en 2005 lorsqu’est créé un établissement Traction régional regroupant tous les établissements du Pays de la Loire, rompant avec la notion du dépôt lié à un territoire géographique circonscrit. Et c’est Angers qui sera retenu, Le Mans devenant une Unité de production Traction, avant, en vertu de la spécialisation des unités opérationnelles par activités, de se réduire encore à une Direction de lignes TER mulifonctionnelle regroupant contrôleurs, vente, escale et conducteurs.
Ce livre fort bien illustré de nombreux documents de métier n’est pas seulement la monographie classique d’un dépôt de la SNCF. Cette « longue marche » vers un déclassement illustre exemplairement le sort de nombre d’établissements de la SNCF, bouleversés par les remaniements des hiérarchies fonctionnelles et opérationnelles, la gestion par activités induisant la spécialisation des conducteurs. Fusions, suppressions, délocalisations, tel est le régime continu des établissements de la SNCF, parfaitement illustré ici quant à leurs motifs comme à leur impact social : non seulement la charge de travail et les effectifs, mais les roulements, diversement appréciés.
Benoît Hardy complète fort heureusement son martyrologe en rappelant concrètement et de manière très pédagogique quelques innovations plutôt heureuses que connaîtront en général les agents de conduite de la SNCF de sa génération. Le lecteur appréciera les longs développements consacrés à l’art de s’arrêter et à l’importance de la connaissance de la ligne (p. 72), à l’évolution des sanctions avec la fin de retenues financières (p. 76), à l’impact de la mise en service de la radio sol-train (p. 81), aux progrès vécus depuis les corps de garde aux foyers rénovés (p. 85), jusqu’au rituel du dernier train (p. 89). Chef de l’UP Traction au Mans de 2012 à 2016, Bertrand Nicolle conclut positivement : si l’image bien ancrée d’un monde de la Traction à part, « distant et très masculin », a volé en éclat, du moins il a été positivement révolutionné par l’informatique, par le confort indéniable des cabines et lieux de découché, par une révolution digitale mettant fin avec ses smartphones et tablettes aux antiques classeurs et documents papier qui remplissaient l’ample sacoche du roulant…
En vente à la boutique de La Vie du Rail au 29 rue de Clichy et sur le site de la boutique de la Vie du Rail.
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