Durant 16 ans passés à la SNCF depuis 1967, Jean Ravel, après avoir introduit et acclimaté le mot « marketing » dans l’entreprise, en sera l’efficace metteur en scène. À l’écoute des attentes des voyageurs enfin sondés, cette révolution associera notamment COnfort et RAIL avec l’avènement des voitures CORAIL, conçues avec le concours du designer Roger Tallon, complice de cette révolution. L’année 1981, conjuguant arrivée du TGV et de la gauche au pouvoir, clôt ce tournant, Ravel quittant la SNCF en 1983.
Cet article se concentre sur les années 701, marquées par la promotion de la fonction commerciale au sein d’une SNCF où la culture technique est prédominante, où les ingénieurs des grandes écoles font des carrières de techniciens dans les divers domaines de la gestion de l’entreprise, que l’on nomme alors l’Exploitation (EX), le Matériel et la Traction (MT), la Voie et les Bâtiments (VB). La fonction commerciale, insérée dans la fonction Exploitation, lui est subordonnée et exclusivement occupée par la tarification et la réglementation. L’introduction du marketing bouscule les organigrammes à partir de 1969, jusqu’à l’émergence de deux grandes directions commerciales Voyageurs et Marchandises aboutie en 1977. Un « tournant commercial » dont on rappelle ici qu’il ne se fit pas sans résistances internes, mais finalement réussi comme l’assumait Jean Ravel (1929-2011). Dans un ouvrage qui se veut de référence, François Caron a escamoté cette révolution du marketing des années 70, qu’il date plutôt « des années 80 », mentionnant un programme d’action plus tardif de Jean Ravel visant les trains rapides nationaux, les trains omnibus et de banlieue2. Ce chapitre majeur de l’histoire de la SNCF mérite d’être rappelé aussi dans la période actuelle de remue-ménage du système ferroviaire français, qui devrait répondre aux attentes impatientes des « territoires »…
« Un vendeur de bière » à la SNCF
En 1967, sollicité de rejoindre la SNCF par son directeur général Roger Guibert, Jean Ravel refusera d’abord : « Je ne suis pas polytechnicien, je ne suis pas cheminot, il me paraît difficile de m’insérer dans un tel système », avant de céder.